Le BIM en 2017 : sommes-nous prêts?

hopital plan modélisé

Sommes-nous prêts pour ce que plusieurs qualifient comme la voie de l’avenir dans le domaine de la construction, le BIM? Alain Deschênes, enseignant en Technologie de la mécanique du bâtiment et formateur à la Direction du service aux entreprises et de la formation continue, a publié un article qui vulgarise le BIM et ses différents niveaux de la collaboration. Voici son texte, paru dans la revue IMB d’octobre 2017, la revue officielle de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec (CMMTQ).

Le BIM en 2017 : sommes-nous prêts ?

Sommes-nous prêts pour ce que plusieurs qualifient comme la voie de l’avenir dans le domaine de la construction ?

Soyons réalistes, l’avenir se prépare dès maintenant, car quelques grands donneurs d’ouvrage ont déjà pris la décision d’exiger une approche BIM dans leurs nouveaux projets ! Par exemple, la Société québécoise des infrastructures (SQI) a établi un plan de déploiement de 2016 à 2021 qui inclura la réalisation d’environ 15 projets majeurs en 3D selon une approche BIM.

Qu’est-ce que le BIM ?

Commençons par l’acronyme BIM (Building Information Modeling) qui se traduit au Québec par MDB (modélisation des données du bâtiment), dans la mesure où le terme « bâtiment » est interprété dans son sens générique, c’est-à-dire qu’il englobe également les infrastructures et les réseaux techniques.

Il s’agit ici de modélisation de données du bâtiment dans le but d’assurer les tâches de conception, de simulation et de réalisation, et d’y inclure, éventuellement, la gestion de bâtiment (son exploitation), à l’aide d’une maquette 3D intelligente comme support visuel. Cette maquette contient une multitude de renseignements pouvant être utilisés à plusieurs niveaux. Il faut comprendre qu’il ne s’agit plus ici de dessins 2D présentant les différents éléments de construction d’un bâtiment à l’aide de lignes, de cercles ou d’éléments graphiques simples, mais plutôt d’une base de données qui génère des éléments graphiques 2D et 3D qui, à leur tour, contiennent différents renseignements techniques pouvant être utiles à la réalisation des travaux. Cependant, un processus BIM intègre plus que du 3D :

  • 2D : réaliser des dessins 2D (vues en plan, en coupe, en élévation, de détail, etc.);
  • 3D : réaliser des vues 3D du projet;
  • 4D : intégrer la maquette à l’intérieur d’un échéancier de réalisation des travaux;
  • 5D : intégrer des éléments de la maquette afin d’en estimer les quantités pour l’estimation des coûts;
  • 6D : intégrer des renseignements de la maquette liés aux performances énergétiques et environnementales de la construction. Ces tâches sont toutes possibles grâce à différents logiciels disponibles sur le marché et dont les caractéristiques et les performances évoluent rapidement;
  • 7D : intégrer des renseignements de la maquette à l’intérieur d’un outil de gestion d’actifs immobiliers.

Les différents niveaux du BIM

Le niveau 1

Le BIM de niveau 1 consiste en un travail isolé et peut comprendre :

  • la réalisation de plans 2D;
  • la réalisation d’une maquette numérique 3D;
  • l’utilisation de ces éléments par un ou plusieurs acteurs travaillant en silo (de manière isolée).

Ne comprend pas :

  • les échanges entre les maquettes des différents intervenants travaillant sur un projet commun, c’est-à-dire que chacun met à jour ses données de façon individuelle sans qu’il y ait de coordination.

À ce stade, les données ne sont pas nécessairement structurées ou compatibles avec les données des autres intervenants du projet, et ce, même si le bâtiment est modélisé en 3D. Difficile de vraiment parler de BIM, car il n’y a pas ou peu de travail collaboratif.

Le niveau 2

Le BIM de niveau 2 correspond au niveau minimal souhaité présentement par la plupart des grands donneurs d’ouvrage de la construction.

Mise en place du travail collaboratif entre les acteurs :

  • une accessibilité aux maquettes de tout un chacun;
  • une combinaison de toutes les maquettes de manière fédérée (plusieurs disciplines liées les unes aux autres);
  • une coordination visuelle et la détection d’interférences entre les différents éléments de construction des maquettes d’une discipline à l’autre;
  • une communication plus efficace entre les intervenants du projet afin d’optimiser la prise de décisions et la résolution de conflits potentiels.

Comprend :

  • une maquette numérique 3D;
  • des données non graphiques (renseignements pour des besoins multiples comme l’analyse énergétique, l’estimation de coûts, la gestion de projet, la préfabrication de certains éléments de construction et, éventuellement, la maintenance de l’ouvrage);
  • un plan de gestion BIM précisant le mode de réalisation du projet, les objectifs, les responsabilités des principaux intervenants du projet, les moyens technologiques qui devront être mis en place et bien plus encore...;
  • une documentation souvent liée aux composants de la maquette 3D;
  • un format de fichier natif (format de fi chier propriétaire du logiciel utilisé) ou un format de fi chier d’échange tel que IFC (Industry Foundation Classes) afin d’assurer une interopérabilité de la maquette numérique pour les différents intervenants d’un même projet.

À ce stade, les données sont structurées dans un environnement commun et les processus de contrôle et d’échange sont clairement définis par le plan de gestion BIM. Il peut donc y avoir une collaboration étroite entre les intervenants du projet. Cependant, il peut y avoir des délais entre les échanges d’information.

Le niveau 3

Le BIM de niveau 3 constitue le niveau optimal, mais pas encore exigé dans l’industrie actuelle.

Objectif ultime du BIM :

  • une maquette unique et partagée par tous les intervenants du projet;
  • une intervention possible par tous, en même temps.

Comprend :

  • le niveau 2 +...;
  • un stockage de l’ensemble des documents sur un serveur centralisé;
  • une accessibilité par tous les intervenants, en temps réel.

Les technologies actuelles permettent un accès plus ou moins facile au niveau 3 pour tous les acteurs. De plus, ce niveau de collaboration complète n’est pas sans poser de problèmes touchant la propriété intellectuelle, les responsabilités professionnelles et la réglementation de l’accès/des modifications et l’enregistrement de la maquette numérique unique. Plusieurs discussions juridiques ont cours présentement à ce sujet.

Les principaux objectifs d’une approche BIM

Plus les intervenants d’un projet communiquent efficacement entre eux, plus le chantier sera efficace!

Or, les objectifs principaux de cette approche sont :

  • une meilleure coordination interdisciplinaire, et ce, tant par les professionnels que les entrepreneurs sur le chantier;
  • une meilleure collaboration avec le donneur d’ouvrage puisque le BIM lui permet d’avoir une meilleure vue d’ensemble de son projet au moment de la conception grâce à la virtualisation 3D du projet;
  • une réduction du nombre et de la valeur des ordres de changement, car de nombreux problèmes potentiels auront été résolus en amont au moment de la conception grâce à la détection d’interférences potentielles et à l’optimisation de la conception;
  • une diminution des délais et des retards dans la réalisation des travaux;
  • une meilleure gestion possible de l’exploitation du bâtiment pendant sa durée de vie utile.

Les étapes clés pour se lancer

Oui, se lancer dans le BIM, c’est une aventure, mais tous ceux qui ont fait le saut et qui en ont compris les enjeux ne veulent plus faire marche arrière!

La réalisation d’un projet BIM de niveau 2 diffère de l’approche traditionnelle et comporte différentes étapes que vous devez prendre en considération avant de vous engager.

  1. La volonté d’implication de la gouvernance de votre entreprise à vouloir s’impliquer dans le processus BIM. En vous engageant dans ce processus, vous devrez changer certaines façons de faire. De plus, il n’est pas recommandé que toute l’entreprise s’engage dans un premier projet : il faut apprivoiser cette approche. Cependant, le message de la direction concernant cet engagement doit être clair, car le changement demande de l’effort, mais aussi de la conviction.
  2. Sélectionner sur le volet, parmi vos collaborateurs, ceux qui sont prêts à s’investir dans ce type de projet et dans la formation qu’une telle approche exige. Dans un processus BIM, il est tout aussi important d’apprendre à utiliser de nouveaux logiciels que d’avoir une vue d’ensemble du processus. À ce sujet, vous devrez penser aux personnes qui seront formées et à quel niveau. Pour vous aider, différents types de formations existent présentement sur le marché :
    • la formation destinée aux gestionnaires d’entreprise qui porte sur la logique et le fonctionnement d’un projet BIM, y compris l’aspect contractuel d’un tel projet sans qu’il y ait nécessairement de formation sur un logiciel en particulier ;
    • la formation destinée aux utilisateurs de logiciels BIM qui permettra d’acquérir les compétences nécessaires à la maîtrise des outils de modélisation 3D, mais aussi les connaissances sur les concepts liés à la collaboration d’un projet BIM, y compris les logiciels relatifs à cette approche collaborative.
  3. Sélectionner votre « coordonnateur BIM » qui supervisera l’implantation de l’approche BIM dans votre entreprise. Cette personne établira les liens et les ponts entre l’équipe en place dans votre entreprise et les autres intervenants dans les projets BIM que vous réaliserez.
  4. Comprendre les attentes du client dans sa volonté de réaliser un projet selon une approche BIM. Pendant un certain temps, certains appels d’offres exigeaient que le projet soit BIM sans que le donneur d’ouvrage en comprenne parfaitement toutes les implications. Cependant, de plus en plus, les donneurs d’ouvrage maîtrisent les concepts, s’impliquent dans la réalisation du plan de gestion BIM et indiquent clairement leurs attentes à cet effet.
  5. Décider de votre niveau d’implication dans votre premier projet BIM. Certains décident de se limiter à une partie du projet, comme la salle mécanique, ou bien optent pour limiter leur investissement à une seule discipline. Cette approche, la plupart du temps, permet à l’équipe attitrée à un nouveau projet BIM de se faire la main et de développer des méthodes de travail optimales en fonction de l’ampleur du projet, tout en les laissant mettre en pratique les connaissances et compétences acquises durant leur formation. Il y a dans la phase de transition une perte de productivité à prévoir. Cependant, après quelques mois, la productivité retrouve son chemin et généralement, elle est plus grande après le processus d’adoption, puisque l’équipe BIM a pu acquérir de nouvelles compétences. Du moins, c’est ce que démontrent des études de pays européens, où l’implantation du BIM est en avance par rapport au Québec.
  6. Assurer le suivi et/ou la surveillance de chantier à l’aide d’outils BIM. Au moyen d’une tablette, il est maintenant possible d’effectuer une visite de chantier, de repérer les déficiences, en plus d’en prendre une photo, de la documenter et de l’envoyer directement à l’entrepreneur et à tout autre intervenant concerné. De son côté, l’entrepreneur corrige la déficience, en fournit la preuve par photo ou d’autres documents pertinents, toujours à partir d’une tablette, et ce, directement sur le chantier. Cette nouvelle réalité améliore grandement le processus global d’acceptation des travaux en cours et finaux.
  7. Faire un bilan de votre premier projet BIM pour cibler les failles et les bons coups, afin d’optimiser le travail de votre nouvelle équipe BIM. En suivant ces conseils, vous vous rendrez vite compte que la collaboration est à la base du succès d’un projet BIM. Pour sa part, la SQI (selon une présentation faite lors d’une séance du Groupe BIM Québec au printemps 2016) vise, avec une approche BIM, à :
    • diminuer de 3 à 10 % les coûts de projet, selon l’ampleur du chantier;
    • réduire de plus de 50 % les reprises de chantier;
    • réduire de 7 à 19 % les délais de réalisation des travaux;
    • réduire les efforts de capture et de gestion de l’information pouvant représenter jusqu’à 5 % des coûts de projet. 

Cégep Limoilou

Le Cégep Limoilou est un établissement d’enseignement supérieur d’avant-garde qui offre plus de 40 programmes et profils de formation dans des domaines très variés : arts, sciences humaines, sciences et technologies, industrie touristique, sciences de la santé et administration. Les valeurs affirmées dans notre projet éducatif, Le savoir, source de liberté, guident au quotidien le travail des 850 membres du personnel en vue de favoriser la réussite des 5 500 étudiantes et étudiants qui nous ont choisis pour réaliser leurs rêves.